L’ère des superlatifs

L’ère des superlatifs

Il ne vous aura pas échappé qu’en cette période troublée nous sommes tous et toutes soumis.es à de multiples injonctions et notamment celle d’aller toujours « plus vite, plus loin ». Comme je suis une adepte de courses à pied, la Covid aura eu raison de bon nombre de courses ou de trails au grand dam des amateur.trices qui se sont rabattu.es sur ce que l’on appelle pudiquement des courses « off » càd sans dossard mais pas dénuées d’esprit de compétition puisque chacun.e possède une montre connectée qui va pouvoir permettre de publier et de comparer le temps de course. On voit d’ailleurs fleurir nombre de challenges avec la mention FTK (ndlr fastest time known, meilleur temps connu) et les courses tendent à s’allonger de façon démesurée (on se trouve sur des formats de courses qui vont au-delà de 500 km!).

Raisons pour lesquelles je suis allée moi aussi de mon superlatif pour tester un autre modèle de course voire plutôt de marche -) , plus en adéquation avec ma vision des choses. D’abord, j’ai choisi de revenir « aux sources » comme disent les puristes et de courir « aux sensations » càd connectée à mon corps et non plus à ma montre, de revenir sans cesse à ce moment présent sans anticiper les ravitos à venir, re-sentir cet environnement que nombreux.ses recherchent sans toutefois s’y arrêter, être à l’écoute de soi et des autres dans l’effort, être à l’écoute de cette nature que l’on est venu chercher (l’écouter, la humer, la palper, l’admirer, la goûter), s’ancrer dans l’effort grâce à la respiration qui nous guide et nous dit que parfois on va trop vite. Un cadeau au regard de ce qui se passe en ce moment, un présent offert grâce à la méditation qui m’a permis de revenir à l’essence et au sens de la vie, tout simplement, sans me dire que je ne suis ni assez rapide, ni assez compétitive.

Méditer c’est au final apprendre à être vivant et faire la paix avec soi-même. C’est aussi prendre le temps donc j’envisage le STK (slowest time known-)) et comme je suis plutôt du genre impatiente, je me suis fait des copines et je cours dorénavant en ff (ndlr five fingers, ces petites chaussures légères comme une seconde peau qui ressemblent à des gants mais pour les pieds!). Vous vous demanderez peut-être quel est le lien entre ces chaussures et l’impatience? Tout simplement qu’il faut un apprentissage assez long et qu’il n’est possible de courir que peu de temps pour les apprivoiser sous peine de se blesser. En plus de laisser le temps au temps, ces petites merveilles vous donnent la sensation de courir pieds nus donc idéal pour sentir le terrain, un régal qui me permet d’être au plus près de mes sensations… La boucle est bouclée et ces parenthèses forestières me permettent de méditer en prenant juste le temps d’une respiration. À l’époque du fast food et du binge watching, un véritable luxe que l’on peut décider de s’offrir et qui ne coûte rien si ce n’est l’effort et la récompense, parfois inattendue, de surprendre un écureuil ou un chevreuil au coin du taillis (pour ceux et celles qui ont la chance d’avoir un bois à proximité mais on peut aussi être surpris dans la jungle urbaine -), suffit juste de se laisser surprendre).

Five fingers, mes copines de courses